"Tu viens de loin, si loin. L'espoir est ton chemin, toi, l'étranger". Mon père arrive en France en juin 1969 ; puis ma mère, ma grand-mère, ma sœur et moi, nous suivons le même chemin, en voiture, à pied et en train. Ce chemin qui nous conduit dans le pays dit de l'espoir. Comme des milliers de Portugais, nous quittons tout pour des jours meilleurs et nous y arrivons. Nous n'avons pas trop de mal à conquérir notre nouveau monde et à nous y installer. La vie se déroule simplement et de la nouvelle musique arrive à la maison. C'est sans doute la première musique enregistrée qui passe le pas de la porte des Ribeiro ; cette porte si bien gardée par les mélodies envoûtantes de maman, interprétant des dizaines de chansons populaires mais aussi quelques airs de Fado, appris ça et là aux champs du labeur quotidien. C'était un électrophone qui allait bien avec notre nouveau statut, et quelques disques nous avaient été offerts avec cette nouvelle acquisition. Il y avait Dalida, Enrico Macias, Frank Alamo, Alain Barrière, Adamo, Georgette Plana, etc. Les mélodies étaient là, un certain rythme aussi. Les années suivantes, la télévision entre chez nous et les soirées de fin de semaine sont très attendues. Il y a Johnny, Sylvie, Eddy, Dick, Cloclo, Joe Dassin, Mike Brant... Les chansons n'en finissent pas et mon enthousiasme pour le chant grandit alors que je commence à comprendre le français, enfin, et que je termine mes journées d'école avec maman dans les vignes de Belvès de Castillon. Maman chante et chante encore. Elle ne fatigue pas et garde la voix claire. Alors, moi qui m'égosille à essayer d'imiter Mike Brant ou Cloclo, je demande : "Comment faites-vous pour ne pas avoir mal à la gorge ?". Maman me répond simplement : "Il ne faut surtout pas forcer sur la gorge !". Voilà que ma mère, qui n'a jamais pris un cours de chant, vient de me donner ma première leçon. Quel bonheur de chanter, de courir, de rêver quand on a douze ans, et que la lune est à portée de main..... Retrouvez la suite dans le livret du CD.